les écorchés

Parce qu’on s’était liés d’amitié avec un tas d’enfants terribles, qu’on s’amusait à se tirer face à la vie, parce qu’on a jamais trouvé de meilleure cible, on s’enfilait des doses et on s’payait nos nuits. On s’était fait toute une raison, d’avoir l’cœur flou et l’âme au vent, et puis la rage qui flingue nos illusions, parce qu’on venait tout juste d’avoir seize ans. Parce qu’on baisait dans l’caniveau, parce qu’on avait rien d’autre pour s’faire vibrer, parce qu’on à jamais voulu faire comme il faut et qu’on avait qu’le sexe pour exister. Les années folles ont été dures, bourrées d’amour et de mépris, des émotions qu’on balançait contre les murs, flambées le jour, cramées la nuit. Parce qu’on s’étalait là sans pudeur, parce qu’on n’voulait pas d’ce monde un peu crétin, et parce qu’on a fini par s’eclater le cœur, bien sûr à force de trop serrer nos poings. J’sais pas si j’ai gagné, j’sais pas si j’ai le droit, si j’peux prendre mon pied sans qu’on me montre du doigt. J’ai pris la route aujourd’hui, j’sais pas trop comment ça va, si y’a personne qui me suit, être seul c’est dur à supporter parfois. Hier on s’est planté, j’sais pas c’qui nous a pris, on n’aurait pas dû s’embrasser, on n’aurait pas dû faire de bruit. De toute façon on s’en fout, j’veux pas d’gosse ni de chien, tout ça c’est pas pour nous, et on à plus peur de rien. Mais dis moi ma jolie, qu’est ce que tu fous à genoux ? Qu’est ce que cet homme t’as dit en t’embrassant un peu partout ? J’sais si j’vais rester, moi ici je m’ennui, j’rêvais d’être avec toi, mais tout à changé depuis c’te nuit. Dis, est ce que j’suis un bon coup ? Tu veux que j’t’appelle un taxi ? Tu sais j’ai plus beaucoup de sous, et puis ça m’fait bander quand tu souris. Et oui l’passage à l’acte ça nous rend ivre, c’est lourd de sens quand on y pense, ça fait frémir d’partir si loin, on s’en écorcherait même d’impatience …